Objectif photo et composition
Vous restez bien d’accord avec moi que le plus important se situe du côté de la focale.
Son influence sur les capacités de composition est considérable.
Utiliser les lignes fuyantes d’un trottoir et l’espacement des plans avec une focale courte devient extrêmement facile.
Une valeur plus longue (50 mm) vous guidera vers des arrangements plus géométriques et plus « frontals ». La profondeur des différents plans se contracte.
L’ouverture
Plus vous êtes ouvert, plus vous vous propulsez vers une vitesse rapide, moins vous plongez en ISO.
Certes, mais l’absence de grain ne demeure pas l’alpha et l’oméga de la photo de rue.
J’ai même tendance à penser qu’il ajoute un contexte bénéfique au cliché.
Inconsciemment, le public l’associe à la nuit ou au mauvais temps.
Il est un élément de composition à ne pas négliger.
Alors pourquoi gaspiller son argent pour gagner un diaphragme rarement utilisé en photo de rue ?
La distorsion, aberration chromatique, vignetage
Ce sont des arguments de vente que l’on peut entendre.
Ils sont présentés à grand renfort de graphiques et de tests.
Je vais être clair sur ce sujet et je reviens à ma petite histoire au début de l’article.
Est-ce le plus important ?
Gagner 0,1 en aberration va-t-il améliorer vos photos ?
Dès que l’on achète une marque reconnue, en évitant les versions économiques, les objectifs demeurent globalement de bonnes factures.
Un delta existe peut-être.
Personnellement je ne consulte jamais ces graphiques.
Vous me suivez toujours ?
On va attaquer le dur maintenant…
Choisir son objectif photo.

La décision d’un objectif photo qui vous correspond demeure certainement la démarche qui vous fera le plus progresser.
Lorsque vous aurez trouvé votre distance, la focale découlera d’elle même. cf. l’article de Depardon un peu plus haut.
L’utilisation régulière imprimera dans votre regard l’angle de prise de vue.
Avant même de porter le viseur à votre œil, vous possédez déjà la composition.
Plus important, vous allez vous déplacer pour gagner la perspective qui vous convient.
Inconsciemment, vous construisez votre image sans votre appareil.
Vous vous éloignez des considérations matérielles pour découvrir le monde de la démarche photographique, du sujet et de la recherche de composition.
Zoomer et se rapprocher : ce n’est pas pareil
Vous devrez tout de même pratiquer avec constance.
L’erreur la plus fréquente se situe dans le nomadisme dans le choix des objectifs.
Dans un premier temps, la focale doit entrer dans votre pupille.
Vous devez vous en imprégner, l’avoir à fleur de peau comme votre jean préféré.
Si vous changez régulièrement de cailloux, vous éprouverez des difficultés à l’apprendre.
Un coup, vous travaillez au 28, puis vous passez au 50 pour revenir au 28.
Vous découvrirez une multitude de raisons pour ôter et remettre votre caillou.
Par exemple, le sujet est trop éloigné ou vous aimeriez éliminer un peu plus d’arrière-plans.
Au diable les changements.
Rapprochez-vous !
Les différents plans de la focale
La focale agit fortement sur l’étalement des plans derrière le sujet.
Les lignes s’estompent ou s’amplifient suivant l’objectif.
Le cadrage au 50 fait plus la part belle à la géométrie frontale.
Étudier l’influence de la focale sur la composition demanderait un article complet.
Juste deux exemples tirés de mon logiciel de simulation favori.
Faisons l’expérience.
La même scène avec un 16 mm et un 90 mm.
Dans un cas on va zoomer et dans l’autre se rapprocher.
Mon sujet se trouve à 10 m et j’utilise un 16 mm.
Bien trop loin, je zoome !
Et hop au 90 mm
Et maintenant, au lieu de manœuvrer la bague du zoom. Je reste à la focale de 16 mm et je me rapproche avec mes petits pieds…
J’arrive à 1,90 m du modèle en sueur après un tel effort !
Le résultat :
L’issue reste tout de même différente sur l’environnement du sujet !
Je n’ai pas de préférence : 90 ou 16 mm.
C’est juste autre chose.
Vous désirez éliminer l’arrière-plan ?
Se rapprocher fonctionne aussi !
Et oui, la profondeur de champ change suivant la distance de mise au point.
La profondeur de champ varie avec l’éloignement du sujet.
Je reprends encore mon petit logiciel de simulation !
Avec mon 35 mm à 2,50 m du sujet
Maintenant le même diaphragme (f/2) mais à 5 m.
La conséquence ?
Dans une foule, vous serez obligé de rentrer dans les narines du sujet pour l’isoler de l’arrière-plan.
Dans ce cas-là, je demande la permission avec un petit sourire (lorsqu’il n’y a pas de masque…).

Ne pas changer de focale a surement été ma meilleure décision lors de l’achat de mon Nikon FM2.
Bien que j’avais à disposition un 28 et un magnifique 85 ouvert à 1.8, je n’ai pas bougé mon 50 mm de mon appareil pendant plus d’un an.
J’arrivais, malgré l’angle très fermé de cet objectif, à prendre des photos sans le porter à mon œil.
À l’aveugle, je dirigeais mon boitier et je shootais.
Ensuite, je suis passé au 28 mm.
L’apprentissage a été beaucoup plus rapide.
Peut-être étais-je un peu plus habitué ?
Je shootais sans cadrer, au feeling, et les résultats apparaissaient souvent à la hauteur de ce que j’avais imaginé.
Opter pour une focale fixe et patienter pour l’achat d’un zoom est certainement le meilleur conseil que j’ai appliqué.
D’ailleurs, je ne possède pas de zoom.
Pourquoi ?
D’une part, les focales fixes demeurent moins chères et plus ouvertes.
D’autre part, elles restent moins lourdes et moins agressives : effet tromblon pointant les personnes.
Et pour finir, la tentation de varier la focale disparaissait définitivement.
Petit flash-back
Tout a commencé par une partie de pêche.
Drôle d’idée?
L’élément déclencheur pour résister aux conseils des marketeurs apparait.
Le problème ne vient pas du matériel mais du bonhomme.
Une fois la canne à pêche rangée, il est temps de s’occuper de nos cailloux.
Un petit tour du côté de Cartier Bresson, Plossu, Horvat et Depardon confirme l’importance du choix de l’objectif pour votre démarche.
Chacun opte pour sa focale suivant son projet ou ces préférences et sa distance privilégiée.
Dans tout ceci, il n’est pas question d’aberration ou d’autres problèmes de vignetage.
Seul compte l’influence de l’arrière-plan.
Les courtes focales procurent du contexte et des compositions de lignes plus aisés.
À l’opposé, des compositions plus géométriques et moins contextualisées seront à l’honneur.
Le zoom devient inutile et vos pieds sont votre meilleur atout pour vous placer à l’emplacement idéal.
En effet, l’avantage de recourir régulièrement une focale fixe permet de se la « mettre » dans l’œil.
Sans cadrer, vous serez capable de vous mettre au bon endroit et de shooter.
50, 40, 35 ou 28 mm ?
Vous possédez les clefs pour choisir et tester. Cela dépend de votre distance de confort.
Même si lors de rassemblement important, ou que vous plongez dans la foule, les plus courtes focales seront bien plus commodes.
Certainement une raison de l’option courante du 35 mm.
Maintenant, à vous de trouver votre éloignement et d’expérimenter l’objectif longtemps !
Armez-vous de votre boitier, vissez un caillou et ne touchez plus à rien durant plusieurs mois.
Ce sera un peu gênant au début, vous raterez des chefs d’œuvres (ce sont toujours les chefs d’œuvres que l’on rate).
Vous me maudirez, de m’avoir écouté et rangé votre zoom.
Mais, avec le temps, tout doucement, vous déclencherez sans viser, l’appareil à bout de bras, à la recherche de la composition imaginée.
Et vous y arriverez !
Vous posséderez votre objectif dans l’œil.
Si vous avez déjà le vôtre et que vous êtes à l’aise avec lui, partagez-nous votre expérience en commentaire.
Merci pour cet article Docteur (et les liens vers les deux ITW).
Personnellement pour le moment je suis au 16mm car je veux du contexte quite à croper ensuite mais justement comme tu le dis il est important d’avoir l’image en tête (je shoote souvent sans viseur) et à certains moments (3-5m) je sens qu’il faudrait que je sois « plus » dans l’action par rapport à l’image que j’ai en tête donc je pense passer sur un 35mm – meme si au 16mm je tiens à dire que je ne vois franchement pas d’aberrations aberrantes (…et pendant ce temps là j’ai une amie photographe qui elle ne jure désormais qu’au 150 ! 😉 ).
Bonjour,
Pour ma part j’utilise le plus souvent un 85mm f/1,8 en photo de rue, du moins urbaine plutôt, vu les nuances chères aux puristes (que je ne suis pas) … Il m’arrive aussi de prendre un 50mm, mais pour moi c’est déjà du grand angle … Ah ah … Plus rarement j’ai même sorti mon 105mm macro en ville … J’ai un faible pour les focales longues …
Bonjour merci pour toutes ces informations. Tous vos boitiers sont des pleins formats? Sur un APS-C canon D700 il faut tenir compte de la conversion ×1,6 donc trouver un 22mm pour avoir un 35mm et 35mm pour avoir un 56mm. Si vous avez testé je suis preneuse de votre expérience. Bonne journée
Les appareils modernes transportent trop de rêves qui ne sont que des cauchemars qui tuent la créativité. En vérité, nous n’utilisons qu’une infime partie des possibilités de l’appareil. Pour les cailloux, c’est pareil… La communication stratégique des fabricants pousse à toujours plus au détriment de l’essentiel. J’utilise mon d600 comme j’utilise mon Contax S2. 24mm pour le d600 et 28mm pour le Contax S2. Parfois un zoom mais rarement.
Bonjour Dominique,
Plus jeune, j’ai expérimenté le sténopé.
Ce fut la révélation de la simplicité de la photo.
Une boite à chaussure, un petit trou, du papier sensible et une pose longue sur un appui de fenêtre suffisent largement.
C’est tout.
Développement par contact avec la lampe de bureau, difficile de faire plus simple.
Une fois que l’on a réalisé cette expérience, la communication des entreprises produit beaucoup moins d’impact.
Belle journée
Vous avez l’humour et vous êtes généreux ! Merci pour vos conseils. La plupart de mes photos je le fais avec mon i-phone, car je l’ai tj sur moi. Mais un Fudji X100F me tenterait…. Bravo pour votre conseil : Viser sans utiliser le viseur (mais c’est uniquement praticable avec un objectif fixe n’est ce pas ?. Moi aussi j’ai l’horreur des zooms. Bravo pour vos articles ! Combien je vous dois ? 🙂 Bonne journée, otto
Le fuji X100f que je viens de casser ? est formidable pour la photo de tous les jours.
Il tient dans la poche de ma veste et se loge facilement dans une besace avec mes autres objets perso.
La version X100V, avec l’écran inclinable, ouvre de nombreuses possibilités.
Pour déclencher sans viser, il faut connaître sa focale.
Et pour cela, garder la même focale est le meilleur moyen de l’apprendre.
Commencez par un grand angle (genre 28mm), puis utiliser du 35 et du 50.
Au 50, c’est chaud. Il faut vraiment avoir l’habitude.
Belle journée et à bientôt
Retour aux fondamentaux ! Ça fait du bien !!
C’est vrai : avec toutes ces options techniques des nouveaux appareils on perd l’essentiel : le sujet !
?
Oui tout à fait.